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Niché dans une petite maison sur les berges de l’Ill, le centre Salam propose à quelques 500 enfants et 90 adultes des cours de langue et de religion. Cet endroit, affilié à la mosquée Salam, répond à des besoins de transmission de la communauté musulmane et rythme également la vie de tout le quartier.

"Ta mère, elle vient pas te chercher ?", lance Safir Boustil, à un jeune garçon qui court vers la sortie, trottinette à la main. Le responsable du centre culturel et cultuel Salam, au 3 quai du Murhof, prend soin de tous ses élèves inscrits dans ce que les habitués appellent "l’école arabe". Situé sur les berges de l’Ill, en face du Murhof, la petite maison en crépi d’un étage aux volets rouges est un lieu de vie important de la communauté musulmane du quartier. Il attire aussi des personnes des villes voisines de Lingolsheim et Ostwald.

Un centre au cœur du Murhof

Cette bâtisse en longueur hébergeait jusqu'en 2017 la mosquée de la Montagne-Verte. Aujourd’hui, elle rassemble des activités culturelles et cultuelles portées par deux associations distinctes. Le soutien scolaire, l’apprentissage de l’arabe et de l’anglais dépendent de l’Association culturelle des merveilles de la Montagne-Verte (l’ACMMV). 

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Mercredi, 17h30 : les parents viennent chercher leurs enfants devant le centre Salam. © Esther Sarazin

Les cours de lecture du Coran et de religion relèvent quant à eux du centre Salam, du même nom que la mosquée située maintenant sur la place d'Ostwald. Ici, toutes ces activités cohabitent. Yannis, 8 ans, enchaîne son cours d’anglais avec le cours de lecture du Coran. Pour une centaine d’euros à l’année, 500 enfants et 90 adultes suivent les formations proposées tous les jours de la semaine, dans les quatre petites salles de cours décorées d'affiches éducatives et de dessins.

Faire lien, renouer avec ses origines 

Malika, résidente du Murhof, se promenait le long des berges quand elle a poussé pour la première fois les portes du centre. L’endroit lui a tout de suite plu. Aujourd’hui elle y enseigne la lecture du Coran et l’arabe aux enfants. Elle confie : "Quand les enfants viennent le soir, ils sont un peu fatigués, mais toujours heureux d’être là." "J’aime bien venir parce qu’on fait les devoirs et quand on a fini on peut faire des jeux de société", indique un garçon âgé de 8 ans gigotant sur sa chaise.

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Nawal apprend aux enfants le nom des couleurs en arabe ainsi que les lettres de l’alphabet. © Esther Sarazin

Il participe trois soirs par semaine aux sessions de soutien scolaire organisées en partenariat avec l’école du Gliesberg. Pour les parents, le centre permet la transmission à leurs enfants de la langue arabe et de la culture musulmane. "On est une famille à double culture [franco-algérienne]. C’est important que les enfants n'oublient pas leur langue", témoigne une mère de famille, venue chercher sa fratrie de trois. Aucune école du quartier ne propose l’apprentissage de l’arabe. Krounasana a décidé d’inscrire ses quatre enfants spécifiquement au centre Salam : les "gens travaillent avec leur cœur". Elle apprécie notamment la journée des prophètes où les enfants "apprennent une partie de leur histoire culturelle".

À 18h30, les plus jeunes commencent à quitter les lieux et les adultes prennent le relais. Fatima et Nawal, habillées de long manteaux chaud, leur hijab épinglé autour du visage, arrivent au cours de lecture du Coran pour femmes. Les deux amies, qui en plus d’être élèves sont animatrices et enseignantes de langue arabe au centre, ont suivi Safir Boustil il y a trois ans quand ce dernier a quitté la mosquée de Lingolsheim. Elles y retrouvent Khadija, une retraitée de 70 ans, qui fréquentait déjà le lieu quand il faisait encore office de mosquée. Pour elle, c'est un moment qui la fait sortir de son quotidien :"Ça fait plaisir, on voit des gens, on rigole, ça fait du bien."

 

Le rayonnement de la mosquée

En plus d'être un endroit éducatif, le centre est aussi un lieu ludique. Safir Boustil organise une fois par mois des activités, des sorties et des soirées jeux. Allant de trois à dix euros, ces journées sont l’occasion pour les jeunes de sortir de leur quotidien, "car les ados s'ennuient", confie-t-il. "Le temps qu’on passe ici ça nous empêche de faire des bêtises dehors", relève Yahia, lycéen. L’animateur en profite pour les encourager à "être de bons musulmans mais surtout de bonnes personnes". En les poussant à s’investir dans des associations, à aider leurs parents pour les tâches ménagères, il suit son mantra : "L’homme le plus aimé de Dieu est l’homme le plus utile aux autres." Informaticien de métier, il est aussi bénévole à la mosquée de Hautepierre et entraîneur de foot à Lingolsheim. "Ceux-là, je les entraîne aussi au foot, j’en peux plus de les voir", plaisante-t-il en désignant un groupe de trois adolescents.

Le quai du Murhof entretient des liens avec d’autres structures de la Montagne-Verte. Tous les lundis après-midi, un agent de la mairie vient aider les gens à remplir leurs papiers administratifs. Une permanence qui profite au centre : "Il y a toujours quelqu’un qui toque à la porte", explique Safir Boustil. À quelques minutes à pied, en face de la nouvelle mosquée, l’association organise annuellement au mois de juin une kermesse qui rassemble tout le quartier sur la place d’Ostwald. À ce moment, se mélangent stand de merguez, glaces, concert et structures gonflables où jouent des jeunes enfants, traînent des groupes d’adolescents et discutent des parents.

 Mahault de Fontainieu et Esther Sarazin

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Fatima anime un atelier pour les petits enfants. © Esther Sarazin

Une mosquée en évolution

Le vendredi à l’heure de la grande prière, la place d’Ostwald habituellement passante, réunit près de 1000 hommes, dont beaucoup vêtus de djellaba. Une fréquentation importante qui oblige le lieu à organiser deux temps de prière pour que tout le monde puisse rentrer. Actuellement en travaux, le futur lieu de culte accueillera toutes les activités hébergées au 3 quai du Murhof, mais également une grande salle de prière pour les femmes ainsi que des logements étudiants. À travers toutes ces initiatives, Safir Boustil voit la possibilité de rendre à "la mosquée son sens littéral en arabe 'masjid' c’est-à-dire 'le lieu où l’on se rassemble'".

© Mahault de Fontainieu

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