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Face au risque de l’isolement et au besoin de communication avec l’administration, de nombreux ressortissants étrangers apprennent le français. Parmi eux Qoussaï, Maimaite et Oana, qui profitent tous trois de cours de langue proposés à la Montagne-Verte.

Quoussai : "J'en ai besoin dans chaque petit détail de la vie

Ce vendredi, Qoussai "est plus fatigué que d’habitude", remarque son enseignante de français Hasna Belaïdi. Il a du mal avec la conjugaison des verbes du premier groupe. À plusieurs reprises, il prononce le "ent" muet de la fin des verbes. La professeure du centre socioculturel de la Montagne-Verte le fait répéter encore et encore. Originaire de Syrie, Qoussai a travaillé pour l’ONG Syrian for Truth and Justice (STJ) et a rédigé des rapports sur les droits de l’Homme. En 2018, il a fui en Turquie où il a poursuivi son activité. Mais les menaces de mort et les pressions sur sa famille restée en Syrie n’ont pas cessé. Il a adressé une demande d’asile politique à l’ambassade de France et a obtenu sa carte de résident permanent durant l’été 2024. Qoussai prend des cours de français depuis quelques semaines. 

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Comme chaque vendredi, Qoussai assiste au cours de français. © Stéphanie Ghacibeh

Pressé de progresser, il déplore les difficultés d’accès à un enseignement de qualité : "La demande est très grande mais peu d’offres existent. J’ai besoin du français dans chaque petit détail de la vie." À plus long terme, il espère devenir un "membre actif dans la société". Pour le moment, l’anglais lui permet de se faire comprendre par les commerçants strasbourgeois habitués aux touristes. Le vrai problème pour lui, c’est la communication avec les administrations et organismes publics, où le français est indispensable. "J’ai beau préparer deux trois phrases, ça sonne toujours faux", regrette-t-il. Un interprète lui est souvent nécessaire.

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Maimaite, réfugiée Ouïghour. © Stéphanie Ghacibeh

Maimaite : "Le CSC est devenu ma famille"

Les joues un peu rouges, Maimaite, les mains gantées, bêche une petite parcelle de terre où elle travaille. Malgré son arthrose, cette Ouïghoure de 60 ans s’occupe d’un jardin partagé, quai de Traenheim, avec cinq autres femmes françaises du quartier. Elle profite ce jour-là de la présence de son fils, qui a grandi en France et parle parfaitement la langue. Dans ce jardin, elle travaille tout en exerçant son français un peu maladroit. "J’apprends le vocabulaire de l’horticulture. Je ne connais pas beaucoup de légumes d’ici", précise Maimaite. Elle est arrivée en France avec son mari et son fils cadet, il y a treize ans. Son mari chargé des démarches et de la communication, elle n'a au départ pas considéré le français comme essentiel.

Mais après son divorce, elle s’est retrouvée seule et a décidé de s’inscrire aux cours du CSC. "J’apprends surtout pour comprendre tout ce qui est administratif. Ce qu’on me dit à la préfecture, les rendez-vous à la banque…" Coupée de sa famille restée au Xinjiang, où réside encore son fils, elle tisse grâce à ses cours des liens avec des habitants de son quartier. "Je suis allée au CSC pour trouver de l’aide. C’est devenu ma famille", livre-t-elle. Le centre lui a conseillé de participer au jardin partagé.

"Mon fils a déjà la nationalité française. Je demande maintenant à l’avoir, peut-être que ça sera plus facile si je progresse en français", imagine-t-elle. Depuis l’adoption de la loi immigration en janvier 2024, l’administration exige que le demandeur de carte de résident ait une maîtrise de la langue suffisante (niveau intermédiaire B1).

Oana : "Le théâtre, le musée, c'est en français"

"Les personnes sont bien intégrées quand elles comprennent tout. Elles sont indépendantes", confie Oana qui sort d’un rendez-vous médical, emmitouflée sous son manteau. Économiste en Roumanie, elle est arrivée de Bucarest il y a deux ans pour rejoindre son mari. "Au début, c’était difficile de comprendre les gens dans la rue. C’était très frustrant." Une amertune qu’elle subit dans de nombreux domaines. Avide de culture, là encore sa non-maîtrise du français la pénalise : "J’aime la culture. Mais quand tu veux aller au théâtre, au musée, c’est en français." C’est à l’école Erckmann-Chatrian, où était scolarisé son fils, qu’Oana a commencé son initiation. Comme dans les autres écoles du quartier, des cours y sont dispensés pour les parents d’élèves par le CSC.

Aujourd’hui, les cours qu’a suivis Oana lui permettent d’aider son enfant dans ses débuts au collège. Elle a aussi fréquenté un temps l’Université populaire de Strasbourg : "c’était un cours intensif et un peu cher", se souvient-elle. Clubs, formation en ligne, devoirs avec son fils, elle pratique au maximum : "Je vais à beaucoup d’ateliers pour parler avec les gens." Pour le moment sans emploi, Oana aimerait exercer un métier dans le milieu de l’art. Actuellement, "beaucoup d’entreprises demandent au minimum le B1", indique-t-elle. Oana espère atteindre ce niveau en 2025.

Stépahine Ghacibeh et Jade Santerre 

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Oana espère se reconvertir dans l'art. © Stéphanie Ghacibeh

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