13 février 2025
Les députés ont débattu de sujets internationaux ce mardi 11 février 2025. © Nataya Sensei, Pexels
Les navires de l’Union européenne peuvent continuer à pêcher le thon dans les eaux du Cap-Vert
Le Parlement européen a donné son feu vert pour l’accord de pêche entre l’Union européenne et le Cap-Vert. Jusqu’en 2029, 56 navires de pêche portugais, français et espagnols pourront sortir des eaux 7000 tonnes de thons rouges, requins bleus et espadons. Ce partenariat économique existe avec le pays africain depuis 1990. Il a été revu plusieurs fois, en 2007 puis en 2016, pour répondre à des exigences de durabilité. Le député en charge du dossier Paulo Do Nascimento Cabral (PPE, droite) se félicite de l’équilibre de l’accord commercial entre les deux pays : “C’est loin d’être un accord prédateur. Le Cap-Vert va recevoir de l’Union Européenne des fonds pour rendre sa pêche plus durable.”
La lutte contre les pêcheurs illégaux trace l’un des axes majeurs de l’accord commercial. Irina Popescu, chercheuse au think-tank du Parlement européen, détaille l’importance écologique de cette mesure : “Certains pêcheurs utilisent des équipements interdits ou opèrent dans des aires protégées. Les espaces maritimes et les espèces protégées sont affectés. [Le quota de 7000 tonnes] permet d’éviter la surexploitation des ressources.”
En contrepartie de l’autorisation à pêcher, les 27 pays membres s’engagent à payer au Cap-Vert plus de 780 000 euros par an. Les industriels de la pêche européens devront eux payer des redevances annuelles aux autorités capverdiennes qui s’élèvent à près de 600 000 euros.
Thomas Dagnas
Élections, réseaux sociaux et ingérence étrangère : comment l’UE se défend ?
À l’aube des élections fédérales en Allemagne, Elon Musk, propriétaire du réseau social X, affiche ouvertement son soutien au parti d’extrême-droite AfD. Une ingérence qui suscite la crainte de l’Europe. Afin de préciser sa stratégie de lutte contre ces menaces 2.0, le Parlement européen a donc convié les journalistes à une table ronde.
L’un des outils privilégiés de l’Union européenne contre ces menaces est le Digital Services Act (DSA). Un règlement européen, entré en vigueur en février 2024, qui a pour but de réguler les contenus illicites et la désinformation sur les réseaux sociaux. Tout particulièrement en période électorale.
Grâce au DSA, "on a identifié des schémas pendant les élections en Roumanie", assure Aude Maio-Coliche, directrice de la communication du Service diplomatique de l’Union européenne. Pour rappel, fin novembre 2024, la Russie avait été accusée d’avoir manipulé le résultat des élections présidentielles roumaines, via le réseau social chinois Tiktok. "Aujourd’hui, on travaille avec l’Allemagne. On dispose même de systèmes d’alerte rapides pour échanger nos informations. Donc nous espérons que la Commission européenne sera prête pour ces prochaines élections." Les Allemands sont appelés aux urnes le 23 février prochain.
Par ailleurs, le Parlement européen n’exclut pas de renforcer son arsenal avec le temps, comme l’a affirmé la vice-présidente Christel Schaldemose (S&D, gauche) : "Si on voit dans un an ou plus que le DSA n’est pas suffisant pour protéger nos démocraties, il faudra en faire plus."
Laura Perrusson
Adhésion de la Serbie à l’UE : un dialogue de sourd
Les eurodéputés ont débattu de la situation politique en Serbie. Le pays candidat à l’adhésion est secoué depuis trois mois par des manifestations exceptionnelles par leur ampleur et leur durée, du jamais vu depuis les années 2000. Plus de 50 000 personnes se sont mobilisées à Belgrade. Suite à l’effondrement du toit extérieur de la gare de Novi Sad le 1er novembre 2024, des manifestations ont fleuri dans tout le pays pour apporter soutien aux victimes et dénoncer la corruption de tout un gouvernement. D’origine étudiante, les protestations sont aujourd’hui rejointes par toutes les couches de la société.
Ces manifestations sont une “chance à saisir pour faire avancer la Serbie dans sa voix européenne” selon Marta Kos, commissaire à l’élargissement. Candidat officiel à l’adhésion depuis 2012, la Serbie est un “pilier de la stabilité dans les Balkans”, selon M. Fourlas (PPE, droite). Il est donc dans l’intérêt de l’Union de la faire “entrer dans la famille européenne, poursuit Marta Kos, ce qui est l’aspiration pacifique des étudiants et manifestants serbes”.
Jean Arnaud Dérens, historien des Balkans et rédacteur en chef du Courrier des Balkans, n’en fait pas la même interprétation. Selon l’auteur des Balkans en 100 questions, le soutien de plusieurs dirigeants européens, comme Emmanuel Macron, Viktor Orban ou Giorgia Meloni, à Aleksandar Vučić, président serbe “pro-européen”, a disqualifié l’Union européenne. Ce désintérêt a été accentué par le “silence de Bruxelles à propos de ces manifestations”. Jean Arnaud Dérens qualifie donc d’avantage cette mobilisation de “marche de libération”.
Iris Pavie
Faciliter les liaisons aériennes avec Dacca
Désormais, la compagnie aérienne Air France peut décoller de Madrid direction le Bangladesh. Jusqu’ici, ses avions ne pouvaient décoller que du territoire français. C’est ce que change cet accord européen voté à l’unanimité par les eurodéputés. Celui-ci autorise toutes les compagnies aériennes européennes à proposer un trajet vers Dacca, à condition d’un départ ou une correspondance depuis l’un des septs pays concernés par l’accord : la Belgique, le Danemark, l'Italie, les Pays-Bas, la Pologne, la France et la Slovaquie. Cette modification fait suite à un arrêt de la Cour de justice européenne.
Le vote harmonise les accords bilatéraux, déjà existants avec le droit de l'UE, notamment en matière de sécurité aérienne et de concurrence pour s’aligner sur les règles en vigueur établies par l’UE. Le rapporteur de la commission parlementaire du groupe du Parti populaire européen, Tomas Tobé (PPE, droite), avait d'ailleurs recommandé “l'approbation de cet accord afin de promouvoir la concurrence et la connectivité aérienne entre le Bangladesh et l’Union.” Signé depuis juin 2024, son vote en session plénière lui permet d’entrer en vigueur dès à présent, et ce, pour tous les États membres de l’union.
Alizée Grides
L214 défend bec et ongles le bien-être animal
Une vingtaine de militants de l’association animaliste L214, affublés de têtes de poulets en silicone et de costumes noirs, interpellent les eurodéputés de passage. “Don’t chicken out” (ne faites pas les poules mouillées), voilà le slogan utilisé pour alerter les élus sur l’importance d’une législation européenne sur la souffrance animale.
Hélène Gauche, militante salariée à L214 Grand Est, explique être présente “pour ne pas que le sujet soit oublié”. À côté de ses collègues déguisés en volaille, elle tend des tracts à tous les fonctionnaires européens sur place et les invite à porter un pin’s de soutien en forme de tête de poulet. Discutant avec les représentants de l’association, les eurodéputés ont pu évoquer leur volonté de poursuivre les efforts entamés par une Initiative Citoyenne Européenne (ICE) sur le bien-être animal en 2021. Cette dernière avait reçu 1,4 million de signatures, mais seul un règlement de la Commission sur le transport animalier en avait résulté, laissant un goût de trop peu aux militants.
Bien que limitée par une interdiction policière de s’approcher des portes du Parlement, la mobilisation a suscité deux rapides interventions d’eurodéputées dans l’hémicycle mercredi. Tilly Metz (Les Verts, gauche) et Lynn Boylan (The Left, extrême-gauche) ont interpellé la Commission sur les lacunes de son programme annuel en matière de de bien-être animal.
Arthur Besnard
Le Parlement européen débat de la création d’un État palestinien
Le 19 janvier dernier, après quinze mois de guerre et de drames humanitaires, un fragile cessez-le-feu est entré en vigueur entre Israël et le Hamas. À l'occasion d'un débat sur la stratégie de l’Union européenne pour le Proche-Orient, l’avenir de l’enclave palestinienne a été largement évoqué. “Nous devons mettre un terme à tous les obstacles qui entravent [la mise en place] d’une solution à deux États” assurait David Mcallister (PPE - Droite). La création d’un État palestinien séparé d’Israël par les frontières de 1967 pourrait, selon la majorité des groupes parlementaires, maintenir la paix dans la région. Une idée que partage la commissaire pour la Méditerranée Dubravka Šuica.
Cette prise de position était importante pour les eurodéputés après que Donald Trump ait présenté son souhait de “prendre le contrôle de la bande de Gaza” et de déplacer la population palestinienne vers les pays aux alentours. Des pratiques pourtant qualifiable de crime de guerre, selon Human Rights Watch.
Pour leur part, les députés des extrêmes droites (ECR, PfE, ENS) ne se sont pas prononcés favorablement sur la question. “Il y a une solution, et elle passe par une administration internationale des territoires palestiniens, parce que les Palestiniens ne peuvent pas le faire eux-même”, affirme António Tânger Corrêa (PfE). Rima Hassan, députée franco-palestinienne (The Left, extrême-gauche), conteste “un discours de propagande qui consiste simplement à dire qu’il n’y a pas de colonisation, pas d’occupation, pas de génocide, pas de régime d’apartheid et que les reponsables sont les victimes.”
Tom Soriano
Trump divise l'UE : quels leviers au secours de la CPI ?
“Trump vient d’attaquer, peut-être même d’en finir avec la Cour pénale internationale. Et que fait l’Europe ? Elle déplore, elle regrette, elle condamne mais ce ne sont que des paroles”, déclare Mounir Satouri, eurodéputé (Les Verts, gauche). Donald Trump a signé un décret le 6 février sanctionnant la CPI et les employés responsables des “transgressions” qu’elle commet. La Haye avait lancé un mandat d’arrêt contre le Premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou et l'ancien ministre de la Défense Yoav Gallant, ce qui a déplu à Trump.
La CPI a été créée par le Statut de Rome, entré en vigueur en 2002. C’est un tribunal international permanent qui a été fondé pour juger les personnes accusées d’avoir commis des crimes qui touchent l’ensemble de la communauté internationale. Face aux attaques étasuniennes contre la CPI, le Parlement européen est divisé. Pendant que la gauche exige l’activation de leviers diplomatiques et économiques contre la Maison blanche, les partis les plus à droite remettent la Cour en question, surtout pour les mandats d’arrêt contre les responsables israéliens.
“Il est incroyable de voir que certains États membres se félicitent des mesures de Trump”, s’exclame Raquel García Hermida-van der Walle, eurodéputée Renew (centriste), qui partage avec la Commission européenne la peur d’un effet domino d’impunité internationale. Pour Rima Hassan (La Gauche, extrême gauche), “soit on défend coûte que coûte le droit international, soit on participe directement à sa destruction. Soit on reste aligné avec ce qu’on prétend défendre, soit on apparaît aux yeux du monde comme hypocrites”.
Stéphanie Ghacibeh