13 février 2025
Rouslan Stefantchouk a appelé l'UE à poursuivre son soutien à l'Ukraine. © Daina Le Lardic
Alors que Donald Trump a suspendu les aides étrangères américaines, l’Union européenne se retrouve en première ligne pour soutenir l’Ukraine. Lors d’un débat au Parlement européen, plusieurs eurodéputés ont plaidé pour une augmentation de l’aide au-delà des 50 milliards d’euros déjà prévus jusqu’en 2027 pour soutenir la reconstruction de l’Ukraine.
“C'est vous et vos collègues qui avez mobilisé plus de 50 milliards d'euros de soutien à l'Ukraine [jusqu’en 2027] dans le cadre du programme Ukraine facility”, se réjouit Rouslan Stefantchouk président de la Rada, le parlement ukrainien. Devant les eurodéputés, ce colosse en tenue militaire salue les efforts de l'Union européenne, en ce jour de commémoration des trois ans de l’invasion russe, il attend de “bonnes nouvelles” du Parlement.
Un appel entendu par la majorité des groupes parlementaires. “Il faut faire plus, il faut plus d’aide financière et humanitaire”, martèle le socialiste Marcos Ros Sempere (S&D, gauche). “La Russie et les États-Unis ne doivent pas décider de l’avenir du continent”, soutient aussi Marie-Agnes Strack-Zimmermann, députée du groupe Renew (centre) à la tribune.
Dès son investiture, Donald Trump a révoqué une grande partie de l’aide financière américaine à Kiev. L’Ukraine était l’un des principaux bénéficiaires de l’USAID, l’agence pour le développement international qui pilote les aides humanitaires et économiques de Washington vers l’étranger. Depuis le début de l’offensive russe, ce sont plus de 37 milliards de dollars pour l’aide humanitaire, pour le développement, et pour l’aide au budget qui ont été versés au pays par l’agence. Or, le gouvernement américain a décidé de la supprimer.
Aider l’Ukraine, à quel prix ?
Cette manœuvre de Donald Trump place l’Union européenne dans une position délicate où elle devrait assurer le soutien à l’Ukraine sans les Américains. “L'Europe devrait être en mesure de compenser une partie du déficit financier [créé par les États-Unis], mais pas la totalité”, assure Marie-Agnès Strack-Zimmerman. Pour l’instant, l’UE s’est engagée à débloquer 50 milliards d'euros. Dans cette somme, 35 milliards d’euros de prêt seront garantis par les avoir gelés de la Banque centrale de Russie. “Nous devons tout faire pour que l'Ukraine l’emporte” affirme l'eurodéputée.
Mais ces appels à intensifier l’aide financière ne font pas l'unanimité au sein du Parlement européen. Certains groupes parlementaires d’extrême droite expriment des réserves, voire une franche opposition, à l’augmentation de l’aide. “Alors que l'économie de l’UE est en stagnation, où est-ce qu'on va puiser pour trouver cet argent ?’’, s’interroge Csaba Domotor (Patriotes Pour l'Europe, extrême droite) au cours de la séance.
“Il nous faudra envisager une issue diplomatique”
Entre les envolées interventionnistes des majorités et les réserves de l'extrême-droite, Manon Aubry, co-présidente du groupe La Gauche (extrême gauche), promeut la fin des combats : “Nous sommes engagés dans une forme de gouffre sans fin et il nous faudra envisager une issue diplomatique en Ukraine. On ne fait jamais la paix avec ses amis, on fait toujours la paix avec ses ennemis. C’est avec Vladimir Poutine qu’il faut conclure un accord de paix.”
Une prise de position qui fait écho à celle du président Ukrainien, Volodymyr Zelensky, qui a écrit sur X : “L'Ukraine souhaite la paix plus que quiconque. Nous définissons nos mesures conjointes avec l'Amérique pour mettre fin à l'agression russe et garantir une paix fiable et durable.” Des propos tenus quelques heures après que Donald Trump ait annoncé avoir convenu d’une rencontre avec Vladimir Poutine en Arabie Saoudite, et de négociations “immédiates” sur l’Ukraine. Une célérité que le Parlement n’avait pas envisagée.
Défendre les valeurs européennes
Pour Olga Kostenko, qui préside l'association PromoUkraina venant en aide aux victimes ukrainiennes de la guerre, le soutien européen est une question éthique. “L’Europe est une institution qui se fonde sur des valeurs [de bien commun]. Les chars russes peuvent être ici dans deux ou trois jours si l'Ukraine tombe. Si on ne défend pas l'Ukraine maintenant, on va perdre toutes les valeurs.”
Si la présidente se dit très reconnaissante à l’UE pour l’aide déjà fournie, elle invite à faire plus : “On ne dort pas parce que notre famille est en Ukraine. Il y a des bombardements la nuit. On demande à ce que notre ciel soit fermé. Politiquement, le parlement a fait tout son possible, mais maintenant, il faut prendre des décisions militaires.”
Hady Minthé et Tom Soriano