27 mars 2019
Les députés européens ont adopté mardi 26 mars un texte qui crée de nouveaux droits pour les consommateurs en cas de service numérique défectueux. Sont concernés les produits connectés ou intelligents, mais aussi les services en ligne comme les applications.
« Ne vous inquiétez plus. Soyez heureux. Vous pouvez maintenant acheter en ligne sans mauvaises surprises. » La commissaire européenne tchèque Vera Jourova s’est réjouie de l'adoption par le Parlement européen, ce mardi, de la directive sur les contrats numériques. Un texte adopté par 90% des députés. Des applaudissements nourris ont salué le vote, signe de la grande cohésion du Parlement autour de ce texte, qui garantit de nouveaux droits aux consommateurs.
Des droits communs pour tous les européens
Films à la demande, musique en streaming, applications mobiles… le marché du numérique dématérialisé est en pleine expansion. La plateforme de musique suédoise Spotify a ainsi réalisé un chiffre d’affaires de 1,35 milliard d’euros en 2018, en augmentation de 31% en un an.
Mais les services numériques s’intègrent aussi désormais dans des objets physiques, des objets dits “intelligents” : Smartphones, télévisions, voitures autonomes, montres connectées… La technologie a investi notre quotidien. Ces produits ont tous ce point commun : soumettre le consommateur aux caprices des logiciels et autres applications.
Aujourd’hui, seuls le Royaume-Uni et les Pays-Bas offrent à leurs ressortissants un système complet de protection en cas de défaillances numériques. Dans d’autres pays européens, cette législation est tout simplement inexistante. Le texte adopté par les eurodéputés met fin à cette disparité en instituant un cadre juridique commun aux 28 Etats membres. Les consommateurs européens auront dorénavant tous les mêmes droits.
Les nouveaux droits des consommateurs :
Les services numériques seront couvert par une garantie de 2 ans pour un achat ponctuel, ou durant toute la durée du contrat pour un abonnement.
Pour un achat ponctuel le consommateur n’aura pas à apporter la preuve du défaut lors de la première année. Ce sera au vendeur de prouver que le défaut n’existe pas.
En cas de défaut, le vendeur devra résoudre le problème dans un « délai raisonnable ». Sinon, le consommateur pourra réclamer un remplacement ou un remboursement.
Les services numériques devront obligatoirement être régulièrement mis à jour. En cas de changement de l’offre ou du service, le consommateur pourra choisir de résilier son contrat.
Une protection aussi valable sur les réseaux sociaux.
La directive prend en compte la difficulté croissante de dissocier le logiciel de l’objet qui le contient. « Le smartphone est l’exemple type de la disparition des frontières entre l’objet physique et son logiciel », explique l’eurodéputé belge Pascal Arimont (PPE, chrétiens démocrates). Si une application mobile est défectueuse, l’utilisateur n’aura plus à prouver que le défaut vient de celle-ci ou du téléphone lui-même. Une preuve quasiment impossible à obtenir. Avec ce nouveau texte les utilisateurs pourront directement demander au fournisseur de régler le problème.
Les services numériques gratuits sont aussi concernés. En utilisant ces applications, les utilisateurs ont l’illusion d’un service offert sans contrepartie. Pourtant, en échange, leurs données personnelles sont exploitées. Un procédé largement utilisé aujourd’hui par les réseaux sociaux tels Facebook ou Twitter. Pour la rapporteure allemande Evelyne Gebhardt (S&D, sociaux démocrates), « fournir des données personnelles est de fait un paiement ». Que le consommateur paye avec sa carte bancaire ou avec ses données personnelles, il aura les mêmes droits. « La directive n’encourage pas les entreprises à collecter les données mais cela les responsabilise », précise-t-elle.
Le marché des objets connectés explose © Sophie Piéplu
Evelyne Gebhardt (S&D, sociaux démocrates) est la rapporteure de la directive © Sophie Mercier
Consommateurs et vendeurs saluent une avancée
Le BEUC (Bureau européen des unions de consommateurs) se dit très heureux de cette nouvelle législation : « c’est un grand pas en avant pour le droits des consommateurs européens », se réjouit Sébastien Pant, son chargé de communication.
Pour Luca Cassetti, directeur des affaires européennes au sein de E-Commerce Europe, ces nouvelles mesures sont satisfaisantes, mais ne vont pas assez loin. « Ce que nous regrettons est que l’harmonisation entre tous les pays de l’Union Européenne n’est pas maximale. » Partout en Europe la garantie minimum sera portée à deux ans. Mais les Etats qui ont déjà un système plus protecteur pourront le conserver. Pour Luca Cassetti, « les petites entreprises auront un challenge beaucoup plus grand à relever que les mastodontes du numérique pour se conformer à ces nouvelles obligations. »
Avec cette législation harmonisant les droits des consommateurs, les eurodéputés espèrent avoir franchi une nouvelle étape dans la construction d’un marché numérique commun en Europe.
Sophie Mercier et Sophie Piéplu