27 septembre 2019
Lors du conseil municipal de rentrée qui s’est tenu dans la soirée du mardi 24 septembre 2019, les élus schilikois ont rejeté la demande de protection fonctionnelle de Jean-Marie Kutner, maire de 2014 à 2018.
Les 35 élus schilikois ont fait leur rentrée politique lors du conseil muncipal, mardi 24 septembre 2019./ CC BY-SA 4.0 Mairie-schiltigheim
C’était l’un des sujets attendus de la rentrée politique à Schiltigheim. Mardi 24 septembre, les élus ont rejeté la demande de protection fonctionnelle de Jean-Marie Kutner lors du conseil municipal. Ce que réclame l’ancien maire, c'est que la commune prenne en charge ses frais d’assistance et de représentation en justice, qui s’élèvent selon lui à 10000 euros. Le dispositif de la protection fonctionnelle protège tout agent public lorsqu’il est victime d’une infraction dans le cadre ou en raison de ses fonctions.
Début juillet, le maire déchu avait réclamé l'octroi de cette protection à l’actuelle première magistrate, Danielle Dambach, suite à trois articles parus simultanément dans le journal Heb’Di, sa page Facebook et son site internet, en décembre 2018, mars et juin 2019. Il accuse Thierry Hans, fondateur et directeur de la publication d’Heb’Di, d’avoir mis en cause son honnêteté et son intégrité dans le cadre de l’exercice de ses fonctions de maire de 2014 à 2018.
La réaction de Thierry Hans ne s’est pas fait attendre : «À pratiquement chaque article publié par Heb’di, Jean-Marie Kutner demande un droit de réponse, ce que nous n’avons pas fait, selon lui, assez rapidement cet été. Il a de ce fait demandé aux tribunaux de nous astreindre à le publier.»
Cette requête s’inscrit dans un contexte politique particulier à Schilick. Le mandat de Jean-Marie Kutner a pris fin en 2018, suite à la démission d’un tiers de ses conseillers de l’époque dont Christian Ball, ancien allié devenu ennemi. Des élections anticipées ont alors permis à Danielle Dambach, candidate écologiste, d’être élue grâce au soutien de son prédécesseur lors du second tour.
26 abstentions et 9 voix contre
Lors du conseil municipal du 24 septembre, Danielle Dambach a appelé chacun à «voter cette délibération en son âme et conscience, dans un souci d’apaisement.» Coup de théâtre au moment du vote : les 26 élus de la majorité se sont abstenu. La maire avait pourtant émis un avis favorable à la requête de Jean-Marie Kutner : «Je vous informe que la Ville de Schiltigheim entend vous accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle, avait-elle indiqué dans une lettre envoyée à l’intéressé datée du 10 septembre. La Ville prendra en charge, à ce titre, vos frais d’assistance et de représentation en justice », avait-elle conclu.
Les neuf élus de l'opposition ont résolument voté contre. «Les citoyens ne doivent pas payer les débours ou les accusations contre Kutner, a martelé le conseiller indépendant Ahmed Fares. La presse est un contre-pouvoir indispensable à la démocratie.» Christian Ball, qui vient tout juste d’être investi par Les Républicains pour les municipales de 2020, en a profité pour critiquer le comportement de la majorité : «En un an, cette protection fonctionnelle a déjà été accordée à deux reprises de manière injustifiée. C’est une utilisation abusive de l’argent des Schilikois.» En réponse, Danielle Dambach a simplement précisé que, dans ce cas, c’est une assurance qui prend en charge les frais, et non les Schilikois.
Deux personnes ont effectivement déjà bénéficié de cette protection depuis l’investiture de la maire : un agent municipal et Maïté Elia, conseillère déléguée à la participation des enfants, des jeunes et des centres socioculturels.
«Je ne demande pas un cadeau, simplement l’application de la loi»
«L’abstention est certainement le message politique le moins courageux, riposte Jean-Marie Kutner. Le conseil municipal est là pour appliquer la loi et ne doit pas laisser place au militantisme de bas étage. Je ne demande pas un cadeau, simplement l’application de la loi», ajoute-t-il.
Pour Guy Siat, maître de conférence en droit public et directeur de l’Ipag (Institut de préparation à l’administration générale), pas de doute, l’ex-maire est dans ses droits : «Les anciens élus peuvent bénéficier de la protection fonctionnelle dès lors que l’attaque dont ils font l’objet est inhérente à leur mandat. La commune doit l’accorder, sauf si l’élu a commis une faute personnelle détachable à sa fonction.»
Suite à la décision du conseil municipal, Jean-Marie Kutner a indiqué avoir demandé un rendez-vous avec le préfet pour contrôler la légalité du vote des élus schilikois. «Je suis prêt à aller jusqu’au tribunal administratif pour faire valoir mes droits», a-t-il affirmé. Contactée par Cuej.info, la maire de Schiltigheim, Danielle Dambach, n’a pas souhaité réagir.
Pauline Boutin et Benjamin Martinez