Déjà deux fois qu’ils battent le pavé strasbourgeois pour obtenir la fermeture du bar associatif identitaire « L’Arcadia ». Les opposants à ce local ont décidé de passer à la vitesse supérieure et organisent le 3 et 4 mars, un week-end de lutte contre cette antenne alsacienne du Bastion social. Retour sur trois mois de confrontation.
Affiche du GUD, drapeau de CasaPound et Aube dorée aux murs de l'Arcadia. Crédits photo : Capture d'écran vidéo facebook
Le 9 décembre 2017 était inauguré l’Arcadia, un bar associatif identitaire à l’initiative du Bastion social, une organisation proche de l’extrême-droite, née à Lyon. Le jour même se tenait la première manifestation contre ce bar, qui a réuni quelque 300 personnes. Un mois plus tard, une seconde manifestation avait lieu, suivie par environ 500 personnes. La municipalité strasbourgeoise a réagi le 22 janvier en adoptant une motion demandant au préfet la dissolution de l’association et la fermeture de l’Arcadia.
Le soir de l’ouverture du bar associatif, un jeune homme français d’origine algérienne a été frappé près de la place d’Austerlitz par un groupe de personnes qui sortaient de la soirée de l’Arcadia. Deux personnes sont interpellées par la police. Le président de l’Arcadia, Valentin Linder, a nié tout lien avec son organisation. Mais l’homme le plus lourdement condamné, huit mois fermes avec maintien en détention, s’avère, d'après les statuts de l'association consultés par Rue89 Strasbourg, être le trésorier de l’association : Thomas Beauffet. L’autre prévenu a écopé de six mois avec sursis et 500 euros d’amende.
L'Arcadia a été vandalisée quelques jours plus tard : une vingtaine de coups de marteau ont étoilé la vitrine et des tags antifascistes ont été inscrits.
Le projet officiel de l’Arcadia est de venir en aide aux « Français les plus démunis vivant dans la rue » en les accueillant dans leur local pour un repas chaud ou en effectuant des collectes alimentaires pour les redistribuer directement dans la rue. Le bilan de cette action est impossible à effectuer, l'association refusant de répondre. Des collectes ont eu lieu. Le directeur d’un supermarché de quartier témoigne : « Ils sont venus une fois faire une collecte sans autorisation et distribuer des flyers aux clients. Nous leur avons expliqué qu’il y avait des procédures à respecter. En plus, une piste cyclable passe devant notre magasin et, avec leur table, ça devenait dangereux. Ils n’étaient pas contents, ont fini par partir et ne sont jamais revenus ». Côté distribution, c’est plus flou. L'association communique sur les réseaux sociaux et de ce qu’elle montre, le même sans-abri revient très souvent dans les photos à l’Arcadia et dans la rue. On retrouve quelques photos de paniers repas emballés dans du plastique.
Des membres du Bastion social avec un sans-abri (à l'origine sans floutage) Crédits photo : Facebook Bastion Social Strasbourg
Si les membres de l’Arcadia ne se revendiquent pas de l’extrême-droite, ils ne le cachent pas non plus. Les murs de leur local sont ornés d’affiches du GUD (Groupe union défense, une organisation d’extrême droite violente) avec des messages comme « Et si Bachar avait raison ? », d’un drapeau d’Aube dorée (un parti politique grec néo-nazi), et d'une affiche évoquant les emprunts de guerre lors de la seconde guerre mondiale. Mais il y a aussi des drapeaux, affiches et autocollants de CasaPound, un mouvement d’extrême-droite italien né au début des années 2000 dont le Bastion social s’inspire.
L’Arcadia organise aussi des rencontres et conférences. Comme le 13 janvier dernier lors de la réception de l’italien Gabriele Adinolfi, théoricien nationaliste-révolutionnaire italien, qui a fait l’objet d’un mandat d’arrêt international en 1980 suite à l’attentat de Bologne (85 morts, plus de 200 blessés).
Le collectif « Fermons l'Arcadia, local fasciste à Strasbourg » appelle de nouveau ses soutiens à se rassembler durant le week-end du 3 et 4 mars. Au programme : une manifestation qui débutera à 14h place de Zurich, un repas solidaire et une soirée de concerts au Molodoï. Le lendemain, dimanche 4 mars, une conférence aura lieu, de nouveau au Molodoï sur le thème « du fascisme et du nationalisme, en France et en Europe ».
En réponse à cette mobilisation, le Bastion social organise une présentation de son mouvement à l’Arcadia, qui se poursuivra par une soirée « carnaval ».
Tanguy Lyonnet
L’Arcadia : Ouvert les jeudi, vendredi et samedi. 29, rue Vauban, 67000 Strasbourg
Le Molodoï : 19, rue du Ban-de-la-Roche, 67000 Strasbourg