Ce matin, Erevan a déploré la mort de 49 soldats arméniens dans des affrontements à la frontière avec l’Azerbaïdjan. Le conflit qui oppose les deux ex-républiques soviétiques dure maintenant depuis trois décennies.
Ce mardi matin, les tensions entre l'Azerbaïdjan et l'Arménie ont connu un nouvel épisode tragique, avec la mort de 49 soldats arméniens. Le conflit dure depuis les années 1990. Photo Google Maps
L’annonce par le Premier ministre arménien Nikol Pachinian de la reprise des affrontements à la frontière entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan ce mardi a suscité de nombreux appels à la désescalade issus de la communauté internationale. Après un cessez-le-feu entre les deux parties, négocié par les forces diplomatiques russes, l’Azerbaïdjan a annoncé « avoir rempli tous ses objectifs » à la frontière avec l’Arménie qui déplore « 49 militaires tués ». La situation reste cependant tendue entre Bakou et Erevan, qu’un conflit géostratégique oppose depuis les années 1990.
Les origines du conflit
Géographiquement, l’Arménie est prise en étau entre la Turquie à l’Ouest et l’Azerbaïdjan à l’Est, deux pays turcophones aux ambitions irrédentistes. Elle constitue de ce fait un obstacle à leur unification, alors même que ces deux entités turcophones se considèrent comme « une seule nation, deux États ». La région du Haut-Karabakh, située entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, cristallise ces tensions d’ordre géostratégique. Historiquement majoritairement peuplée d’arméniens, elle est pourtant rattachée à l’Azerbaïdjan par le gouvernement soviétique au début du 20ème siècle. Cette décision signe les débuts de décennies de tensions.
La première guerre ouverte (1988-1994)
En 1988, dans une tentative de s’émanciper du joug azerbaïdjanais, le Haut-Karabakh s’autoproclame République socialiste soviétique. Lorsque Bakou s’oppose à cette décision, des tensions éclatent et s’aggravent en 1991 avec la tentative de l’Azerbaïdjan de reprendre le contrôle du Haut-Karabakh en abolissant son statut d’autonomie. Le conflit fera en tout plus de 30 000 morts. Il prend officiellement fin en 1994, grâce à l’intervention de la Russie qui entérine alors sa position d’arbitre dans le Caucase. Mais la fin du conflit ouvert ne signe pas pour autant la fin des tensions et les affrontements se poursuivent ponctuellement entre 1994 et 2020.
La seconde guerre ouverte (2020)
En septembre 2020, un nouveau conflit armé éclate lorsque l’Azerbaïdjan lance plusieurs assauts terrestres dans le Haut-Karabakh. Les hostilités durent un mois et 14 jours et voient tour à tour échouer les tentatives de médiation russe, européenne et américaine. Après la prise par Bakou de la capitale du Haut-Karabakh, Erevan accepte de signer un accord de fin des hostilités qui prend effet le 10 novembre 2020. La défaite est sévère pour l’Arménie, contrainte de céder à l’Azerbaïdjan de nombreux territoires stratégiques. Dans la rue, les appels à la démission du Premier ministre Nikol Pachinian se multiplient, mais ce dernier est tout de même réélu.
Le rôle stratégique des pays voisins
Le conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan est intriqué dans un enchevêtrement complexe d’enjeux géostratégiques dans le Caucase. S’y illustre notamment la guerre de l’ombre que se livrent l’Iran et Israël, qui compte l’Azerbaïdjan parmi ses alliés et bases militaires stratégiques. L’Iran a appelé ce mardi à « la retenue et une résolution pacifique des différends entre les deux pays ». Au nord de son territoire vit une forte communauté turcophone, dont Téhéran craint que le conflit au Haut-Karabakh réveille les velléités séparatistes.
Louise Llavori
Édité par Luc Herincx