Après la mort de 48 soldats syriens et de gardes irakiens lundi dans une embuscade, Bagdad, qui tenait à rester neutre dans la guerre civile syrienne, pourrait s'impliquer dans le conflit. Entre ceux qui viennent en aide aux opposants et ceux qui soutiennent le régime, le cas de la Syrie dépasse depuis bien longtemps ses frontières.
Ils étaient 48 soldats blessés à s'être réfugiés en Irak. Conduits par huit gardes irakiens, les soldats syriens ont été attaqués le 4 mars, probablement par des rebelles syriens, alors qu'ils traversaient la province d'al Anbar (ouest), en direction de la frontière. Ils devaient être rendus à la Syrie «par les canaux officiels», a indiqué le ministère irakien de la Défense.
Bagdad, qui s'était jusque-là refusé à appeler au départ de Bachar Al-Assad, se retrouve désormais dos au mur. Impossible pour les autorités irakiennes de faire abstraction de cette attaque. Les habitants sunnites de la province d'al Anbar ont de forts liens tribaux, familiaux et commerciaux avec les habitants de l'est de la Syrie, dont certains sont des rebelles, principalement sunnites. Le gouvernement irakien, dominé par les chiites et proche de l'Iran, a résisté aux pressions occidentales pour désavouer Assad.
Mais l'embuscade met en évidence la fragilité de cete position neutre. «Si l'Irak s'implique dans le conflit syrien, c'est le début assuré d'une explosion majeure de violences confessionnelles» dans le pays, explique l'analyste politique Ihsan al-Shammari à l'AFP.
Le conflit prend une tournure internationale
Au même moment, au Moyen-Orient, on n'hésite pas à armer les rebelles syriens. Le prince saoudien Al-Façal a réaffirmé ce lundi le droit des Syriens à se défendre. L'Arabie Saoudite, accompagnée du Qatar et du Koweit, finance l'envoi de milliers de missiles et de centaines de fusils à lunette ainsi que des missiles anti-chars aux rebelles syriens. D'importants moyens financiers sont déployés par les pays du Golfe. Ce soutien a été implicitement avalisé par le secrétaire d'Etat américain, en visite au Moyen-Orient.
L’Europe et les Etats-Unis se limitent à l'envoi de matériel de communication
Pour l’Europe et les Etats-Unis, pas question de fournir des armes directement aux insurgés syriens. Le risque serait grand de voir les armes tomber entre les mains de terroristes. Ou du Hezbollah qui en profiterait pour augmenter son arsenal, contre Israël. Il en va de la sécurité de toute une région, déjà fortement fragilisée. La responsabilité serait donc trop lourde à porter.
Néanmoins, Laurent Fabius, le ministre des Affaires étrangères avait annoncé l'envoi de moyens de communication aux opposants syriens au mois de juin dernier. Un navire espion allemand s'était livré à des missions d'espionnages au profit de la rébellion syrienne au mois d'août 2012.
John Kerry, le secrétaire d'Etat américain, a confirmé le 4 mars le renforcement de l'aide aux insurgés. Outre le matériel de communication, des équipements médicaux seront envoyés conjointement avec la Turquie.
Ankara multiplie les actions d'isolement du régime syrien. Elle imite quatorze autres pays en fermant son ambassade à Damas. Ancienne alliée de la Syrie, la Turquie est désormais au premier rang des pays à appeler au départ du régime de Damas. Plus de 17 000 personnes s'y sont réfugiées depuis le début de la répression.
La Russie, principal fournisseur d'armes de la Syrie
La Russie, qui demande aux rebelles syriens de déposer les armes, est le principal fournisseur du régime syrien. Elle fournit, à elle seule, 78 % de ces armes selon Human Right Watch. L'armée syrienne dispose de 140 000 à 160 000 hommes, d'artilleries, de tanks et d'hélicoptères. Si ces armes des années soixante-dix sont vieillissantes et parfois en mauvais état, elles sont largement supérieures à celles de la rébellion, pour la plupart légères.
Adama Sissoko