Alors que les armées françaises et africaines assurent leur position au Nord Mali, les propos du chef de la Misma (mission internationale de soutien au Mali) sur une possible opération de sauvetage des otages français affolent leurs familles.
La sortie médiatique du commandant nigérian de la mission internationale de soutien au Mali (Misma), lundi, a renforcé l'inquiétude des familles des otages français détenus au Sahel. Interrogé par BFM-TV, lundi, le général Shehu Abdul Kadir a évoqué la préparation d'une opération visant à libérer les hommes capturés par des rebelles islamistes. "Nous y travaillons (...) Je ne veux pas vous révéler la teneur de nos plans, on garde ça pour nous pour l'instant."
Thierry Dol, Marc Feret, Daniel Larribe et Pierre Legrand, quatre employés d'Areva et Vinci avaient été enlevés, en 2010, au nord du Niger, un rapt revendiqué par Aqmi. Selon le ministre de la Défense français, Jean-Yves le Drian, il est "probable" que les otages français soient détenus dans l'Adrar des Ifoghas, un massif montagneux désertique dans le nord-est du Mali contrôlé par les islamistes.
Après les déclarations du chef de la Misma, les familles des otages ont souligné dans un communiqué que "la proximité des forces armées, dont les forces françaises, près de leur lieu d'emprisonnement, est à la fois une raison d'espérer et renforce la peur des familles, tout en leur donnant une lueur d'espoir."
"Aucune chance de survie"
Pourtant, en visite samedi à Bamako, le président français François Hollande avait fortement encouragé une résolution pacifique, déclarant que les forces françaises étaient "tout près" des otages et qu'il était encore temps pour leurs ravisseurs de les libérer. Avec une armée française en position de force, "les preneurs d'otages sont désormais en situation de repli. Ils pourraient accepter d'ouvrir des négociations avec la perspective d'une porte de sortie", estime Dominique Thomas, chercheur associé à l'EHESS, spécialiste des mouvements politiques de l'islam radical, contacté par le Cuej.
"Sans retirer la responsabilité première de cette situation aux preneurs d’otages, les familles ne pourraient accepter que la vie de Thierry, Marc, Daniel, Pierre, soit mise en danger dans une tentative périlleuse, qui ne laisserait aucune chance de survie à ces hommes innocents", déclarent les familles des otages.
Scénario somalien
Chacun redoute la répétition d'un "scénario somalien". Le 11 janvier, une opération menée par les commandos français de la DGSE pour libérer un agent français, Denis Allex, otage depuis 2009 des islamistes shebab, avait dégénéré et conduit à l'exécution de celui-ci.
"Ce type d'opération est extrêmement compliqué", explique Philippe Migault, spécialiste des questions militaires à l'institut de relations internationales et stratégiques (IRIS), contacté par le Cuej. "
Cela nécessite une grande connaissance, une discipline de feu (précision des tirs d’armes individuelles et concentration des tirs d’armes lourdes et antichars contre les véhicules dotés d’armes d’appui, ndlr) et aussi une intervention discrète et rapide, à la limite de ce qui est possible sur le plan opérationnel." Pour cet enseignant-chercheur, ancien grand reporter, l'inquiétude manifestée par les famille est légitime : "Si la Misma y va, les otages sont morts. Les soldats africains ne sont pas formés pour cela et prévenir les ravisseurs d'une intervention est insensé."
Lorraine Kihl (avec AFP)