Devant le Parlement, ils réclament que Strasbourg soit le siège unique du Parlement européen. (Photo RB/CUEJ)
Moins bien organisés que les lobbys pro-Bruxelles, les partisans du maintien du Parlement européen à Strasbourg attendent Hollande de pied ferme.
« Bruxelles, c'est la technocratie », « Strasbourg symbolise la démocratie », « le Parlement doit rester au bord du Rhin ». Sous une fine pluie, quelques personnes se sont réunies lundi en fin de journée, devant le Parlement européen. L'évènement, planifié sur Facebook, devait être un flashmob en jaune et bleu afin de défendre Strasbourg comme siège unique du Parlement européen. Ce, à quelques heures de l'arrivée de François Hollande dans la capitale alsacienne.
Peut-être échaudée par le temps, la quarantaine de personnes inscrites s'est transformée en une poignée. A tel point que les journalistes étaient plus nombreux que le nombre de participants – à peine dix.
Serpent de mer
La question du lieu du Parlement européen agite Strasbourg et Bruxelles depuis de nombreuses années. Dans un rapport publié en 2011, le vice-président du Parlement Edward McMillan Scott (ADLE) s'offusque du maintien du Parlement au bord du Rhin. Il pointe des coûts financier et écologique faramineux : les douze sessions plénières strasbourgeoises coûteraient 180 millions d'euros chaque année et 19.000 tonnes d'émission de gaz carbonique. Faux sur toute la ligne, rétorque l'Association européenne des jeunes entrepreneurs, qui, dans un autre rapport, évalue cette somme à « seulement » 50 millions d'euros par an. Quant aux émissions de CO2, elles seraient de 4.200 tonnes.
La symbolique est également présente dans ce débat épineux. « Strasbourg est le symbole de la paix, de la réconciliation entre les nations européennes, plaide la conseillère générale centriste Pascale Jurdan Pfeiffer (canton Neuhof-Stockfeld), unique élue présente lors du flashmob. C'est ici que l'Europe s'est faite, le Parlement doit donc y rester. »
Néanmoins, dans ce match Strasbourg-Bruxelles, la force de frappe est nettement à l'avantage des seconds. Là où les organisateurs de la flashmob n'arrivent pas à réunir dix personnes, les pro-Bruxelles peuvent se targuer d'avoir organisé avec succès un séminaire portant sur le projet d'imposer Bruxelles comme siège unique du Parlement européen. Un séminaire organisé au sein même du Parlement...à Strasbourg.
Hollande attendu au tournant
« C'est vrai qu'on est en retard comparé aux lobbys pro-Bruxelles », confie l'organisateur de l'évènement Salam Alo. Cet étudiant en droit de 23 ans explique n'avoir « ni moyen financier, ni soutien politique. Juste une page Facebook. » Pascale Jurdan-Pfeiffer (canton Neuhof-Stockfeld) attend ainsi des « engagements fermes » de la part du président Hollande. « Il a fait preuve de beaucoup de volonté pour le Mali, qu'il fasse de même pour Strasbourg. » La centriste reste néanmoins « sceptique » sur la position de François Hollande. En cause : la signature du contrat triennal « Strasbourg, capitale européenne », des financements ayant pour but de défendre le statut de Strasbourg. Maîtrise des dépenses oblige, l'Etat s'est engagé à verser 47,7 millions d'euros sur la période 2012-2014. Presque trois fois moins que pour le précédent contrat !
François Hollande devrait évoquer la question de la place de Strasbourg au sein de l'Europe vers 15 heures, lors de son déplacement à l'Hôtel de Ville strasbourgeois. Le maire Roland Ries a profité de la conférence de presse sur le pont Starlette pour réaffirmer son souhait d'entendre le chef de l'Etat « défendre la place de Strasbourg au sein de l'Europe ». Idem pour la sénatrice et ancienne première magistrate de la ville Fabienne Keller (UMP) : « Dix mois que nous l'attendons ; ce sera l'occasion d'afficher clairement son attachement et les actions qu'il entend mener pour Strasbourg. On veut savoir ce qu'il veut faire, concrètement. »
Quels que soient les propos du chef de l'Etat, les pro-Strasbourg peuvent néanmoins voir venir. En décembre 2012, un arrêt de la Cour européenne de justice a annulé le vote du Parlement réduisant sont temps de session à Strasbourg pour 2012 et 2013. Les choses sont (pour l'instant) claires : les douze plénières mensuelles se déroulent dans la capitale alsacienne, en aucun cas à Bruxelles. En parfait respect des traités.
Raphaël Badache