Agée de 24 ans, Julie va d'atelier d'écriture en écriture, comme ici au musée historique de la ville de Strasbourg.
Immobilisée dans son fauteuil roulant, Julie explore les chemins de la liberté grâce à l'écriture. La jeune fille participe régulièrement à des ateliers depuis quelques années. Dernièrement, c'est au musée historique de la ville de Strasbourg qu'elle a posé son ordinateur.
Installée face à l'immense maquette de la ville de Strasbourg, Julie cherche les mots pour parler de cette ville qu'elle dit « ne pas bien connaître ». Dans la pénombre de la salle, l'écran de son ordinateur éclaire son visage concentré. Avec son ordinateur qu'elle trimballe partout avec elle, Julie a 24 ans et va d'atelier d'écriture en atelier d'écriture.
Au premier étage du musée historique de la ville de Strasbourg, une quinzaine de participants se sont réunis à l'invitation de la Muz' du service éducatif des musées, de l'Atelier urbain et de l'association le Plaisir d'Ecrire. Le projet est nouveau, fruit de structures qui semblaient faites pour se rencontrer. D'un côté, le Plaisir d'Ecrire propose chaque année un concours d'écriture destiné aux personnes en situation d'insertion sociale et professionnelle, cette année sur le sujet de la ville ; de l'autre, le service éducatif des musées et l'Atelier urbain mènent un travail de réflexion autour de l'histoire de la ville et de son devenir. L'après-midi commence par une visite des lieux, le temps de se laisser emporter par l'histoire de la cité alsacienne. Puis vient le moment de la création, le thème : « Ma ville, instants... »
Décrire la ville, évoquer ce qui la compose... Pour Julie, c'est d'abord la cathédrale, les colombages des maisons alsaciennes, et toutes ces bonnes choses qui remplissent le ventre, la choucroute, les tartes flambées.
« Dire, on est tous pareil »
Originaire de Franche-Comté, elle est arrivée à l'accueil de jour de l'association des paralysés de France (APF) il y a un an et demi. Julie est handicapée moteur depuis sa naissance. « Le handicap est physique, il n'est pas au cerveau ! » rappelle malicieusement la jeune femme dans son fauteuil roulant. Son premier texte écrit en 2008 évoquait la différence « pour dire à ceux qui ont du mal avec la tolérance qu'on est tous pareil, que c'est une forme de richesse ». Depuis elle ne s'est jamais arrêtée d'écrire.
« Mon domaine c'est la poésie. » L'amitié, les départs, les sentiments. Quelques textes intimes, lus seulement par les personnes qu'elle « aime bien », et des écrits réalisés en atelier. « Ils sont moins personnels. Je ne suis pas toute seule, je ne vais pas dire certaines choses en public », reconnaît-elle avec pudeur. « L'écriture me permet de me libérer. Dans notre situation, il y a des choses pas faciles, ça sort mieux dans l'écriture. »
Dans les yeux de la jeune fille, amertume et rêve se croisent. Celui de faire de l'écriture un jour, peut être, son métier. L'écriture, une des seules choses dans laquelle Julie se sent à sa place. Le travail, ça n'a pas vraiment marché, malgré son diplôme d'employé administratif. Aujourd'hui elle aimerait un peu plus d'autonomie, ne plus être obligée d'être accompagnée pour sortir et peut être aussi d'être lauréate du concours Le Plaisir d'Ecrire. Tous les textes des participants seront exposés lors de la restitution de l'Atelier urbain au Hall des Chars, fin mai à Strasbourg.
Aude Malaret