Près de 55 000 personnes se sont susurré des mots doux pendant la 4e édition de Strasbourg Mon Amour. La plupart des couples étaient Strasbourgeois : manque de chance, les organisateurs préfèreraient fêter l'amour avec des touristes.
What's love got to do with it ? s'interrogeait Tina Turner en 1984. Que vient faire l'amour là-dedans ? Trente ans plus tard, alors que la Ville de Strasbourg et l'Office du tourisme dressent le bilan de la 4e édition de "Strasbourg mon Amour", on est en droit de se poser la question. Pendant dix jours, du 5 au 14 février, la capitale de Noël s'est arrogée le titre de celle des petits coeurs et des roses rouges. Au programme : chocolat chaud sous la voûte du Café des Amours, place Kléber, ateliers d'écriture pour dire "je t'aime" plus joliment, déclarations enflammées sur l'écran du cinéma Vox… Il se peut qu'on ait une autre idée du romantisme à deux. Qu'importe, les porteurs du projet ont des paillettes en forme de coeur plein les yeux : avec une fréquentation d'environ 55 000 personnes, dont une écrasante majorité de Strasbourgeois, mission Cupidon accomplie.
Slow Party ! #strasbourg #strasbourgmonamour #dance https://t.co/mVwLaeHr3X
— Jack Typhus (@JackTyphus) 13 Février 2016
"Le caractère romantique de Strasbourg en ressort grandi !", s'emballe Eric Elkouby, en charge du tourisme à la Ville. L'agence Passe-Murailles, qui gérait le Café des Amours, se réjouit elle aussi du succès de la manifestation, "qui a mis de la chaleur et du baume au coeur des Strasbourgeois, après les attentats, où l'on a vu des couples de 17 à 77 ans profiter d'un moment de tendresse à deux". Trop mignon. Les 480 000 euros alloués à une manifestation visant à insuffler un peu de bonheur aux Strasbourgeois n'ont donc pas été déboursés en vain. Quel objectif pour l'édition 2017 ? Encore plus d'amour et d'ours en peluche accrochés aux fenêtres ? Alain Fontanel, premier adjoint en charge de la culture, met fin au suspense : "Le but, c'est d'attirer le public de proximité pour s'atteler à l'objectif final : remplir les hôtels, les restaurants. L'idée est de créer une vraie dynamique touristique en période creuse, pas d'animer la ville." Ah, mince. Les Strasbourgeois ne seraient donc qu'une pièce sur l'échiquier de la croissance du tourisme ?
Cupidon-businessman s'attaque au Japon
Cette année, déjà, Strasbourg a lancé l'offensive sur l'un de ses viviers de touristes de prédilection, le Japon, avec trois petits kiosques implantés à Tokyo. Là-bas, l'opération séduction n'a pas lésiné sur les moyens et n'aura épargné aux Japonais aucun cliché : flammenkueche en coeur, canapés roses, ateliers macarons pour la couleur locale, et même Mister Alsace en personne, « pour des selfies romantiques et décalés. » Belle idée que d'importer l'amour à la française au Japon. Mais qu'on ne s'y trompe pas, le véritable jeu de séduction se déroulait chez les tours-opérateurs rôdant près des kiosques, dans l'optique de vendre un maximum de séjours à Strasbourg.
"L'idéal serait que d'ici quelques années, les journalistes nous demandent si nous ne sommes pas victimes de notre succès, se projette Jean-Jacques Gsell, président de l'Office de tourisme, et qu'ils fassent des articles sur les Strasbourgeois qui ne se sentent plus chez eux, envahis par les touristes en couple !" Le but secret de Strasbourg mon Amour serait donc de nous faire encore plus râler que le marché de Noël. Que l'Office de tourisme se réjouisse : sur Twitter, certains ont déjà commencé.
Des musiques de jeux vidéo avec un fond de verre de crémant à 6€ bof #strasbourgmonamour https://t.co/6HhjlQr2YB
— Féodor Belvédère (@BelvedereFeodor) 8 Février 2016
Nina Moreno