Pourriez-vous vous passer de votre téléphone portable, ne serait-ce qu'une journée ? C'est le défi que propose de relever « La journée mondiale sans téléphone mobile » (et auquel trois Strasbourgeois se sont tenus), fixée depuis douze ans au 6 février. Une date qui n'est pas due au hasard : ce mercredi, c'est la Saint Gaston, le même que dans la chanson signée Nino Ferrer : « Gaston, y'a l'téléphon' qui son'... ». En ce jour de diète téléphonique, Cuej Info a voulu savoir si les Strasbourgeois étaient capables de se détacher de leur portable.
Alors que certains sont complètement addicts à leur téléphone, d'autres arrivent à prendre leurs distances. Photo Mélina Facchin
- Les accros -
« Je l'utilise tellement que ma batterie ne dure que huit heures »
Fanny, 23 ans, le clame haut et fort : elle est complètement addict à son smartphone. Son métier l'y force un peu : elle est « community manager », c'est-à-dire qu'elle travaille avec les réseaux sociaux. « Il fût un temps, si j'oubliais ma recharge, je devenais totalement barjot, mon cœur s'emballait, je paniquais complètement. J'emmenais mon portable avec moi absolument partout, aux toilettes, je le posais même à côté de la douche pour pouvoir répondre s'il sonnait pendant que je me lavais. » Aujourd'hui, elle affirme « s'être calmée ». Et pourtant, elle ne peut pas s'en passer.
« Je le regarde au minimum toutes les dix minutes »
Anthony, étudiant de 19 ans, reconnaît qu'il « ne peut pas vivre sans téléphone, c'est impossible. Si je le coupais, ma copine deviendrait folle. Déjà que si je réponds pas au bout d'une heure, c'est le drame ! » Son téléphone est vieux et bug souvent. « Un jour, je n'ai pas reçu le message d'un pote et j'ai loupé un rendez-vous. On s'est pris la tête, il ne m'a pas cru. Tout ça à cause d'un portable ! » se souvient-il.
« Mon portable, c'est un peu toute ma vie »
Charlotte a 15 ans, elle est en seconde. « Même si je ne l'utilise pas forcément, rien que de le tenir dans ma main, c'est rassurant, ajoute-t-elle. Et si je me rends compte que je l'ai oublié chez moi, je retourne le chercher, même si j'arrive en retard en cours. Obligée ! ». Elle et ses copines ne respectent absolument pas la consigne de leur lycée qui leur impose de laisser leur téléphone éteint au fond de leur sac. Et elles ne s'en cachent même plus devant leurs professeurs.
- Les infidèles -
« J'y arrive sans, mais c'est quand même plus pratique avec»
Marc a 35 ans et rencontre moins de difficulté à se séparer de son mobile. Il a emménagé à Strasbourg il y a deux mois et depuis, il a perdu son portable. Finalement, il se débrouille pour communiquer par mail. « J'ai encore l'espoir de le retrouver dans un carton, mais sinon, j'irai quand même bientôt en racheter un autre », sourit-il.
« Ca ne me pose aucun problème de le laisser chez moi »
Olivier est professeur de droit à l'université de Strasbourg et se dit très détaché de son portable. Prendre de la distance est même parfois nécessaire. « J'ai besoin d'être déconnecté de temps en temps », explique-t-il. « Je me contente de le regarder le soir et je vis très bien comme ça ».
« Il faudrait vraiment pouvoir s'en passer »
Christophe, professeur de théâtre, a refusé pendant de nombreuses années d'avoir un portable. Depuis peu, il a craqué, mais essaye d'en faire « uniquement un usage professionnel ». Et dès qu'il a besoin de passer un coup de fil, il essaye au maximum d'utiliser un fixe. « Je ne vais pas non plus passer une heure à me faire chauffer le cerveau avec toutes ces ondes ! », s'exclame-t-il.
- Les antis -
« C'est du fascisme déguisé »
Le danger potentiel des ondes, c'est ce qui révolte le plus Fredj, artiste d'une cinquantaine d'années. Il a toujours vécu sans portable et n'en n'aura jamais, il le jure. « Et si je tombe en panne, je dormirai dans ma voiture et puis c'est tout », rétorque-t-il à l'argument de l'utilité. Il y a quelques années, Fredj a même milité avec des amis pour dénoncer le danger des ondes. Persuadé que l'essor des mobiles tue la communication au lieu de l'encourager, il compare cette vague technologique à une espèce de « fascisme déguisé ». « Votre patron peut vous appeler n'importe quand, pour n'importe quoi. C'est scandaleux ». Sans compter toutes les conversations « ridicules » qu'il entend au quotidien, dans les transports en commun ou ailleurs, avec cette question existentielle et récurrente dont il ne comprend décidément pas l'utilité : « T'es où ? ». Pour sa part, il se contente de son téléphone fixe et du répondeur, « comme les hommes de Cro-magnon ».
Mélina Facchin